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1 er Concours des 24 Heures de la Nouvelle

1 er Concours des 24 Heures de la Nouvelle
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11 février 2010

Introduction

C'est simple.

L'idée de départ a été trouvé par un dessinateur et scénariste de Bande-Dessinée, j'ai nommé Lewis Trondheim.

Il s'agit en 24 heures, de produire 24 planches de B.D. à partir d'un thème donné juste au début du concours. Des personnes comme Boulet, Lewis Trondheim ou encore Bastien Vivès ont déjà participé à ce projet, qui existe depuis 3 ans.

L'idée serait donc de faire un concours de la Nouvelle, inspiré des 24h de la BD, qui aurait les mêmes règles que ce concours, mais dont la matière première serait une nouvelle ( entre 2 et 6 pages exactement)

L'idée me semble amusante pour tout ceux qui se sentent le stylo, le papier et l'imagination dans l'âme.

Je proposerais plusieurs dates, et ce sera le début des réjouissances!!!!! Chaque personne votera pour sa nouvelle préféré. un gagnant sera alors désigné.

Voili voilou.

En espérant que ça vous branche.

Antoine le Staff.

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11 février 2010

( Gagnante de la première édition.) Le vieil

( Gagnante de la première édition.)

Le vieil anarchiste et le sequoia

L'année avait débuté avec un concert des Dead Bites. J'y était allé avec Job. à ce moment, je méditais encore mon plan avec lui. Chaque sortie était prétexte à ça, et à chaque fois je me disais "à la fin je lui dit". C'est aussi à cette époque que j'eus ma première moto. Un superbe engin, énorme et rutilant, ronflant, mais foutrement jouissif. Nous l'avions achetées en commun avec Job, sans avoir vraiment prévenu nos parents, ce qui fut assez mal accueillis. Mais nous n'en avions rien à faire. Avec ça nous étions les maîtres de la route, du quartier, de New-York et même des Etats-Unis tout entier. C'était ce qu'on se disait, pour oublier qu'on habitait en France et qu'on ne savait pas parler trois mots d'anglais. On s'inventait presque cet univers de Big Shoot où la première ne serait jamais loin de la dernière. C'est toujours Job qui conduisait la moto, parce que ma mère et peut-être un peu la police trouvait que j'était trop jeune. Même si lui-même n'avait pas son permis, on se faisait des virées totalement rocambolesques dans les champs, on y passaient des jours et des nuits, bien sûr seul ou avec des amis, sans avoir prévenu avant. On rêvait tous de grandes choses ou de petites merdiques, mais toujours et invariablement d'autre chose que ce que nous avions. C'était le début d'année, le mois de Février, de Mars. On avait presque la belle vie. Puis sont arrivée les examens et Job décréta qu'il n'avait plus le temps. On ne se vit plus et je restais chez moi pour le restant du printemps.

En Juin, ayant un peu oublié Job, je parti en camp avec des camarades de mon âge, que je me mit bientôt à les détester pour leurs discussions grotesques et décérébrées. Au troisième jour, je me mit à tous les engueuler et je parti en trombe. Je décidais, au lieu de rentrer chez moi, puisque ma mère n'était au courant de rien, de m'accorder une petite escapade à travers le pays. Et puisque la frontière n'était pas loin, j'eus même la légère audace d'y passer pour, enfin, et une fois pour toute, me retrouver en terre inconnue et impossible à découvrir via la barrière de la langue. Tout ce que je voulais. Tout ce que je voulais c'était me perdre, juste me noyer, m'inonder de cette autre chose, d'autres choses. Je n'avais réussi cela jusque à présent uniquement par le biais de la musique. Et là j'avançais dans ce pays frontalier, ayant sans doute l'air infiniment naïve et heureusement perdue, et surtout n'en ayant rien à faire, du regard du passant à celui du commerçant, se demandant sans doute un peu tous qui était cet oiseaux paumée que j'était encore à l'époque. J'arrivais bientôt à Riegel, petite commune située pas loin de la frontière. De là je partit pour Freiburg où habitais une connaissance chez qui je pourrais squatter quelque peu. J'avais deux ou trois sous sur moi, mes pieds et mon pouce pour avancer. Me rappelant un bouquin que j'avais adoré, je décidais à l'égal de Sal de ne manger que de la tarte au pommes et des crèmes glacées durant mon voyage à travers le doux inconnu. Me remémorant ces bons passages de littérature, je parti donc en direction de Freiburg, en longeant un champs de maïs, puis une piste cyclable, une route, et à nouveau un champs de maïs pour m'apercevoir que c'était le même que celui de mon départ. Je me résolus alors à faire du stop, ce que je fit pendant quelques longues heures avant de lâcher l'éponge au coucher du soleil. Je me trouvais un verger en bord de route et m'installais sous un arbre où je serais à l'abri du vent. Je passais la soirée à me remémorer les voyages du printemps en compagnie de Job qui, après tout, me manquait un peu. Un compagnon de route n'aurais peut-être pas été totalement inutile. Comme j'avais emmené un carnet dans l'hypothétique but d'écrire mon voyage, et, à l'origine, mon camp, j'essayai d'écrire un petit bout de mon humeur du jour, mais j'abandonnait trop vite, par fatigue et sûrement par nostalgie.

La journée du lendemain fut la plus belle. Je fut prise en stop par un vieil anarchiste qui m'apprit que nous avions déjà manifestés ensemble. Ensemble, encore, nous nous racontâmes tous nos souvenirs de manifestations, protestations et rebellitudes diverses, sur fond de Neil Young. Le sentiment qui m'étreignit sur place fut des plus fort. J'avais cette sensation de n'être dans cette voiture que dans un film et que ma vie réelle tapait au carreau, essayant en vain d'entrer dans notre retour en arrière. Nous refîmes le monde, nous fîmes de cette guimbarde une machine à rêve totalement pathétique et pourtant irréelle, positivement saoulante. On roula tout le jour pour finir bien au delà de Freiburg. Enivrés que nous étions, nous avions roulés sans nous soucier le moins du monde d'où nous allions. On s'arrêta à une trentaine de kilomètres de Zurich et, écroulés de fatigue et de bonheur, on trouva refuge dans un bed and breakfast.

On reparti le lendemain matin tôt pour le village où le vieil anarchiste possédait un baraque, dont il me parla beaucoup. Elle était, paraît-il vielle et bossue, mais totalement unique "pour la bonne et néanmoins pas si simple raison, mon coco, qu'elle est construite entièrement en bois de séquoia !" me disait-il de son accent bizarre qui était peut-être dut au fait qu'il parlait constamment dans sa barbe sale. « Ce bois, ma vieille, tire son nom d'un très grand chef indien, inventeur lui-même de l'alphabet Cheerokee. Cette maison entière en porte tout son héritage ; ses descendants décidèrent de la faire construire ici, après leur migration européenne. Comme cet arbre ne pousse principalement qu'en Amérique, ils importèrent des tonnes et des tonnes de bois, de séquoia, en Europe, pour ériger un temple à la gloire de leur ancêtre érudit ! ». Il me causa ainsi durant tout le voyage, me chanta les louanges de plus en plus délirants de son habitation, et à quel point elle était symbolique, comme elle représentait bien ces arbres géants, comme elle était mille fois plus majestueuse et comment elle pourrait réduire à néant l'Elysée et

la Maison Blanche.

Pour lui elle était un véritable monument, une entité à elle toute seule, au moins aussi importante que ce qu'elle représentait. C'est tout ce qu'il me disait, et bien plus, et moi, je me contentais d'écouter ses pérégrinations d'un air désintéressé, sans vraiment comprendre la raison de cette engouement mais avec force respect envers ce vieux roublard qui me servirais plus tard d'exemple. J'appris beaucoup sur moi-même ce matin-là. Le vieil anar', tout en parlant de lui, me parlait de moi. En lui je découvrais tous les complexes et les envies qui faisaient que je passais des nuits entières à me torturer l'esprit, grâce à lui je fis la connaissance de ce que je voudrais être, de ce que je serais, en quelque heures j'embrassai autant de choses que je ne connaissais pas de moi qu'en 17 ans de vie commune avec moi-même. À travers cet Insensé parlant tout seul, les yeux fous perçant presque le pare-brise par leur intensité, je me reconnus autant que je me connus.

Arriva le moment de rencontrer cette illustre baraque. Arrivés à quelques kilomètres de celle-ci, le vieux me demanda de me cacher les yeux afin ne pas connaître son emplacement exact. Il me convaincu plus ou moins en m'expliquant, dans son délire désormais habituel, que les services secrets américains cherchaient absolument à savoir le secret de fabrication de sa maison et qu'il valait mieux pour moi et pour tout le monde que je ne connaisse pas l'endroit exact de cette authenticité. Je me prit au jeu du vieux fou et nous arrivèrent bientôt à destination sans que je sache vraiment où nous étions – ce qui m'indifférait plutôt. Je vit simplement qu'elle était située en pleine forêt, un coin plutôt joli, anonyme. La baraque en elle-même était peut-être un peu moins grandiose que me l'avait dit le vieux, malgré tout elle restait une belle maison, autant que je puisse en juger, avec mes maigres notions d'architecture. Lui, il devint fou, encore plus qu'avant, lorsqu'il l'a vue. On entra, se servit un thé, mangea un bout et on se coucha dans l'herbe, dehors. Le vieux était si content de revenir chez lui qu'il n'en pouvait plus et avait résolu de se taire.

Nous restâmes comme cela jusqu'au coucher du soleil, et même après. Lorsque j'eus froid, je rentrai chercher un bol de thé et retournais veiller mon vieux, famélique sous la seule lueur de la lune filtrant entre les arbres. Nous méditèrent ainsi encore un long moment, et n'en pouvant plus je lui demandais pourquoi exactement cette endroit le mettais dans un état pareil. Il ne me répondis pas. Moi je pensais. Pourquoi un vieil anarchiste dans son genre attachait t-il autant d'importance à une maison, si unique soit-elle ? Que s'était t-il passé ici ? Et, s'était t'il vraiment passé quelque chose ? À cette dernière question j'aurais répondu oui avec moindre hésitations, ce que le vieux appuya quelques minutes plus tard :

« -Ma gentille, il s'est passé ici des choses dont tu as sans doute déjà rêvé, et d'autres que tu n'as même jamais pensé à imaginer. Des rêves, des destins, des êtres se sont déterminés ici, l'univers entier aurait pu s'y jouer si nous avions pris cela au sérieux. Mais tu sais, on est pas sérieux quand on a 17 ans. »

Suivit ensuite la plus longue et la plus romanesque histoire de vie. La jeunesse, toute la jeunesse, était passée par cette maison. Le vieux m'appris son nom, son nom de jeune, et son nom de vieux. Il m'appris sa vie, sa première vie, et la seconde qu'il était entrain de vivre, et la troisième qu'il envisageait de vivre après m'avoir tout appris. Il me dit, très solennellement, qu'il allait m'apprendre la vie, mais pas celle que les autres, les parents, les professeurs, voulaient qu'on connaisse, la vraie, l'entière, l'intense. Il me transmit la connaissance, l'indifférence, la différence, la tolérance, le mépris, le savoir et la raison. Il m'enseigna tout, exactement tout ce que lui-même avait appris ici-même. Il m'instruisit sur les complexes, les composites, les rouages et les ensembles. Cette maison de séquoia où on lui avait appris la jeunesse, l'ardeur et la langueur, où on l'avait formé lui aussi, après tant d'autres, aux secrets les moins secrets et pourtant les plus obscurs. Il montra, il démontra, il fit l'image et la thèse, il mima, il fit, défit, trompa, détrompa, obscurci et éclaira tour à tour toute sortes d'idées, de pensées, de conceptions, de sentiments et d'opinions. Tout, et encore plus, passa de son esprit au mien. Nous nous trouvions mutuellement érudit. Ce que le vieux m'appris je le lui rendais en vitalité ; la transmission de notions, d'éléments essentiels, se fit dans les deux sens, de cerveau de vieux fou à celui de jeune insensée, la passion intellectuelle, comme l'as si bien dit Mr Cocteau, aurait pu former un fil si tendu entre nous qu'un archet aurait pu obtenir une plainte céleste.

Vers 7h du matin, je m'éveillai comme d'une longue sieste. La profondeur marquait cette nuit où nous buvions des litres et des litres de thé sans nous arrêter pour autant de parler. La fatigue me tomba dessus d'un coup, ce que le vieux paru remarquer. Il rit dans sa barbe et nous nous couchèrent à nouveau dans l'herbe, pour somnoler jusqu'à être totalement dégrisés de l'exaltation de cette nuit de passions homériques. Nos songes y étaient passées tous à la fois et les uns après les autres. Il ne nous restaient à présent plus qu'à entamer nos vies, moi la deuxième, lui sa dernière.

Nous nous éveillâmes peu avant midi. On prit un déjeuner et on décida sur un accord tacite qu'il était temps que je quitte cette maison. Je descendis dans le jardin, devant la maison. Le vieux m'offrit un gros livre que je rangeai vite sans trop regarder et ajouta:

« -Part et retiens bien le chemin jusqu'ici. Reviens-y un jour et assure toi que la personne que tu y emmèneras ne connaisse pas le chemin. Ensuite tu décideras. Vois cette maison, elle est à toi. »

Nous nous firent nos adieux et je parti sur la route de forêt qui menait à la ville. Après quelque mètres, je demandais sans me retourner « pourquoi le séquoia ? », auquel le vieux me répondit «  mon troisième et dernier nom est George Gist ». Satisfait, je repartait vers la ville, tout en prenant soin d'enregistrer l'exact chemin.

J'arrivais à la ville en fin d'après-midi et, après avoir fait repas d'un bout de tarte aux pommes et d'une glace que j'eus beaucoup de mal à trouver, je me résolu à refaire du stop pour rentrer chez moi. Un allemand d'une quarantaine d'années m'amena jusqu'à la frontière, essayant tant bien que mal d'engager la conversation dans un mélange très approximatif d'anglais, de français et d'allemand. Il abandonna très vite et me déposa donc à la frontière où, exténuée, je marchait encore quelques kilomètres avant de m'écrouler dans un petit bois en bordure de chaussée. La suite n'est que très banale, je pris le train le lendemain le plus tôt possible et débarquai chez moi aux environs de 9h où je fut accueillis avec la plus belle engueulade de ma vie. J'appris que le camp où j'était censée être était déjà rentré la veille, et qu'ayant prévenu ma mère que j'était partie depuis quelques jours déjà, elle m'avait appelée à plusieurs reprises, ce qui n'avait eu aucun effet puisque mon téléphone était resté éteint durant toute la durée du voyage. Je reçu l'ordre de rester consignée dans ma chambre jusqu'à la fin du mois de Juin, nouvelle que je pris avec une totale indifférence, en partie due à l'état d'extrême abattement où je me trouvais et complété par ce que j'avais appris du vieux.

Je dormis tout le jour et me réveillai à 19h, fraiche comme une gardonne, prête a ré-attaquer mon apprentissage, malgré la peine que me causait mon départ d'avec le vieux. Je descendit manger un peu, et reçu un coup de fil de Job :

« - Salut, y'a un concert des Stray Dogs demain soir, tu viens?

- … je pense pouvoir m'arranger. »

Ainsi commençait ma seconde vie, avec un des enseignements fondamentaux du vieil anarchiste, « tu peux toujours faire comme tu veux. ».

Je sortis le vieux bouquin qu'il m'avait donné à mon départ. J'essuyais la poussière de la couverture et lu en riant à moitié « Se-quo-yah, vie et oeuvre d'un Cherokee ».

SARAH BOURDAIRE

11 février 2010

EVANGILE SELON UN RATE. Toi.L'esprit

EVANGILE SELON UN RATE.

Toi.
L'esprit chevelu.
Laisse mes racines glisser au fond de tes entrailles. Ouvre-moi les yeux sur ce monde. Écrase l'ombilic qui me dévore l'intérieur. Guide-Moi. Laisse ta sève couler sur mes paupières. Arrache-moi le calcaire du temps. Referme l'œil globuleux de mes souvenirs. Montre-moi ton visage d'écorce, ton sourire farceur. Fais-moi devenir Autre,végétal, noueux, sauvage et solaire.
J'ouvre les yeux.
Tu es là.

"On se fait grave chier n'empêche", dit Pierrot en crachant un nuage de fumée couleur blues.
"Ouai", dis-je, le dos contre le tronc, " Tu peux passer le joint s'te plaît."
Il me file le joint et je tire dessus de toute mes forces, à me faire péter les poumons.
"Le pire dans tout ça, rajoute Paulo, c'est qu'y a toujours pas une fille à l'horizon, et qu'on est encore entre mecs à se tremper la nouille, autour de ce putain de séquoia...."
"Comme d'hab quoi",commente Patou.
"Et puis j'ai pas encore ouvert les vannes de l'humour, donc tout va bien..." fais-je, entre deux cumulo-nimbus.
"C'est nul Pierre", dit Pierrot.
"Trop con", fait Paulo.
"Va te pendre", marmonne Patou.
"Bon, je vous l'accorde, elle était nulle."
Pierrot rigole. Je passe le joint à Paulo, qui refuse poliment. Je lui râle dessus, poliment, et je fais tourner le zbiff en direction des autres.

Nous somme tout les quatre adossé au tronc d'un énorme séquoia. Un monstre sur racine qui pourrait concurrencer les Tours Jumelles maintenant qu'elles sont dans le bitume new-yorkais. Son écorce ressemble à du biscuit à la cannelle. Elle grimpe vers le ciel et explose en un milliers de branches sombres. Un mastodonte, vous dis-je. Un mastodonte exilé. Parce que les séquoia ne poussent pas en France, mais en Amérique. Qui a bien pût avoir l'idée de ramener cette énergumène au beau milieu de ce parc? Sur une terre inconnue, placé entre le square et la promenade des vieux, pissotière pour clèbs et repose-nuque pour les branleurs dans notre genre? Je le plains ce séquoia. Vraiment.

"Et vous savez pourquoi les suédois laissent dépasser le cul des morts dans les cimetières?" fais Pierrot.
"Putain, tu nous la répète à chaque fois Pierrot. C'est relou à la fin..."
"Z'avez qu'à faire mieux..."
Je réfléchis et je dis:
"C'est l'histoire d'un schtroumpf..."
Patou me stoppe dans mon élan:
" Mais ta gueule...."
"Quoi?"
"Ta-gu-eul-eux! Ou sinon je vais réveiller l'épicerie d'à côté, je lui achète

10 mètres

de cordes, et on te pends haut et court sur une branche du séquoia. Et ensuite on te prends en photo et on l'envoi à l'association des Humoristes Créateurs de blague-Carambar pour qu'ils comprennent une fois pour toute qu'ils doivent arrêter leurs attentats verbaux!!!"
On éclate tous de rire. C'est un bon Patou. Clair et net.
"Qu'est-ce que tu fais Paulo? T'écris ton testament?"
Il est penché au-dessus d'un carnet et il cribouille des hiéroglyphes du Troisième âge avec application.
"J'écris un poème", répond-t-il, sans lâcher des yeux son carnet.
"Tu devrais..." commence Pierrot, qui aspire à ce moment là une énorme taff et fait rougeoyer du tonnerre l'extrémité du joint...."Tu devrais fumer un peu avec nous alors, ça te donnerait de l'inspiration..."
"Non merci. Mon cerveau est  en pleine révolution anarchique. Pas besoin de vos remèdes de grand-mère jamaïcaines pour aligner deux mots."
Patou prends le relai du joint. Il a les genoux plié en mode chauve-souris, les cheveux en barouf et le nez en avant comme une clochette. Il tire une petite taff et regarde le ciel. Il y a plein d'étoiles ce soir. C'est cool.

"Et  sinon, qu'est-ce que ça donne avec Joanne?" me demande Pierrot, en jouant une aiguille de séquoia.
"Ah, Joanne. Bin elle a un mec en fait..."
"Ah...." Il laisse un silence. "Et alors?"
"Quoi, et alors?"
"Bin, où est le problème?"
"Bin, il est de taille le problème, nan?"
"Pas du tout! Tu fais sauter

la Ferrari

du Don Juan, tu enfourches la blonde et le tour est joué! Y a pas à tergiverser.... - ça se dit tergiverser-?"
"Elle est rousse, Pierrot, rousse. Et oui, je crois que ça se dit tergiverser.... Et je crois pas qu'elle ait envie de larguer son Roméo"
"Ok. Admettons."
"C'est la merde quoi. Je suis triste. Un truc à te foutre le cafard pendant 20 ans. "
"Tu laisses tomber si je comprends bien"
"Bin oui. Qu'est-ce tu veux que je foute?! Mes sentiments!!! A la poubelle! Hop! Direct chez le croque-mort. Je vais pas m'emmerder à les soigner, à les recoudre 4000 fois, mes foutus sentiments. Trop marre."
"Dommage."

Pierrot me laisse dans mes élucubrations amoureuses et retourne à son aiguille. Nous sommes au beau milieu d'un parc municipal et il n'y a pas de clodos à

100 mètres

. On se fond parfaitement dans la nuit. Y a juste les lunettes de Paulo qui brillent un peu, mais c'est tout. C'est un calme reposant, qui te vide l'intérieur, qui t'aspire le poids du corps.

A la fin du pétard, il y a assez de fumée autour de nous pour que même le séquoia soit défonce. J'en suis sûr. Je parie même avec Pierrot un verre de whisky. Au final, on se lève, on se frotte le cul et on disparait dans le noir-pétrole du parc.

Les bras en croix. Je sens mes blessures se refermer. L'herbe glisse. Elle sent la terre et la rosée. Du vent m'éclabousse les joues. C'est frais et c'est vrai. Mes larmes de givres se cristallisent au fond du puits de mon âme, là même où tu recueilleras les pièces de monnaie de ma déchéance. Le Faune, avec sa barbiche et son bâton de mage, a déposé une clef en or au creux de ma main. Alors après une gorgée de soleil, je suis venu jusqu'aux portes de ton royaume. Le séquoia ancestral. J'ai toqué à ta porte et les fées gardiennes sont descendues, comme de la pluie. Elles souriaient sous les délices de leurs cheveux. J'ai grimpé les marches de bois, puis j'ai traversé l'arche. Je n'avais plus peur. Les branches poussaient dans tous les sens. Des petites maisonnettes se tenaient là, doucement éclairés par des lucioles. De leurs voix enchantées, elles me pressèrent d'ouvrir la porte. Une poussière bleue s'échappa de la fente. Les yeux me dirent "Au revoir" et je plongea dans le tronc.

On avance dans la rue, huileuse et orangeâtre, comme les droogies dans L'Orange Méchanique. Nos ombres se découpent au rasoir sur la route. On joue aux ombres chinoises.Y a Pierrot qui fait le clown, moi le Croque-mort, Patou le loup-garou grincheux et Paulo, l'ange timide et déchu, plongé dans le tréfonds de ses rêveries. On est prêt à rentrer dans les baraques, à faire le carnage de l'année, à tout cramer, à flinguer les gosses, les perruches, l'hamster et le chat, à noyer les vieux dans une bassine rempli avec nos propres pisses. Encore une idée de Patou ça. Il est tordu parfois Patou, je vous l'avais dit. Mais bon, c'est mon pote. Et mes potes, je les aime diaboliquement.

La sonnerie actionnée par la porte du "Jim's", fait "Cling, Cling, Clong" quand on pénètre à l'intérieur du bar. C'est pas l'ambiance de folie. Deux kékés dans un coin, un tout seul sur une table et encore un sur le comptoir, qui regarde ses pièces de monnaies, comme les décombres de sa vie de merde.
"Salut les évangélistes!"que nous fait le barman," Qu'est-ce j'vous sert?"
"4 Bières, Jésus!"

Chacun devant sa brune, mousseuse à souhait, on se jette des regards comme avant un duel. D'un coup, Hop, on lève tous nos verre et on les vide cul-sec.
"Aaaaaah..." fait Pierrot, "Cette bière est divine. C'est carrément érotique. Je serais prêt à donner un poil de mon torse pour faire l'amour."
"T'as pas de poil au torse," fait  Paulo, qui a lâché son carnet depuis notre arrivée au "Jim's". " Et personne voudrait coucher avec toi pour un poil..."
"Qu'est-ce t'en sais?"
"Oh, chépa, une intuition", ricoche-t- il en se marrant.
On commande une deuxième tourné. 4 Fischer pression. Y a " I can't buy me love" des Beatles qui passe à la sono. Vient ensuite les Sex Pistols, le Warsaw des Joy, Frank Sinatra et son voyage sur la lune, Nick Cave et ses ballades meurtières, Cat Power et sa voix à te fondre le squelette et encore d'autres trucs. Patou joue avec son support cartonné pour bière.

"On voudrait des sous...." se met à chanter Pierrot.
"Oh non, pas ça! Tout sauf Patrick Sébastien" ronchonne Paulo.
"Quoi? Tu renies tes origines? Tu ne vois pas que Saint Patrick est le dernier rempart contre l'intellectualisme ambiant? Qu'il est l'annonciateur tant attendu de l'Apocalypse?"
"C'est clair que pour jouer l'Antéchrist, il est parfait. Faudrait encore...."
On veut débattre sérieusement sur Patrick Sébastien, quand un type nous accoste et nous demande du fric.
"Pas une p'tite pièce siou plait?"
On se regarde. On fait genre qu'on a rien, comme à chaque fois. Le type reste planté devant notre table. Je bois une gorgé en regardant le plafond. Patou continue à jouer. Paulo et Pierrot hausse les épaules pour dire qu'ils n'ont vraiment que dalle.
"Mais vous avez pas un peu de monnaie avec vos bières? Nan?"
Un silence pose ses fesses. Soit il se barre, soit ça explose. C'est quitte au double.
"Jarte de là mec", grogne Patou. Il ne lâche pas des yeux son bout de carton.
"Pardon?" fait le type.
Nous autre, on sait pas où se foutre.
"T'as très bien entendu",dit Patou.
Paulo se met à stresser. Il stresse toujours quand quelque chose ne met à beuger. Pierrot et moi, on ne bronche pas.
"D'où tu te la pètes toi? C'est parce que t'as le cul bien au chaud que tu la joues au dur? Ta maman et ton papa t'on filé combien ce soir? Hein? Tu veux que j'te crève au couteau, c'est ça que tu veux?
Patou ne l'a toujours pas regarder. Un kéké se retourne dans notre direction. Le type devant nous met sa main dans sa poche et se rapproche de la table.
"Petit merdeux va, j't'enc.."
Patou lui embroche la chemise d'une main, son verre à bière, dans l'autre.
"Qu'est-ce qu'il a le clodo? Hein? Il est pas content?" dit-il entre ses mâchoires.
Sur le coup, j'essaie de m'intercaler entre les deux pittbulls, mais pas moyen de les séparer. Ils se regardent avec tellement force, je vous jure, ça donnerait mal aux yeux. Paulo transpire du front, et des mots essaient de sortir de sa bouche. Au moment où Patou et le type allaient se cogner pour de bon, un serveur apparaît. Il vire le type en le chopant à la nuque et nous demande de se calmer. Un flot d'insulte craché, le type disparait enfin. J'ai honte. Y avait de la tristesse dans son regard.

Après cette épisode, y a eut comme un blanc. Genre blanc blanc, couleur désert de Gobi. Pour la peine, on se mange chacun un œuf dur. On enlève les coquilles en silence, Ella Fitzgerald en arrière fond sonore. C'est le moment tragique de l'ouverture des oeufs. Pierrot retente sa chanson de Patrick Sébastien, et on se fends la gueule, nerveusement. On essaie de changer de sujet. Je parle du séquoia dans le parc. Je nous auto-proclame "Les Séquoiamens". Les branleurs du coin, responsable des petites annonces sur bois. Vous savez, Les "Gaspards je t'aim", les "666", les "LOL", les "Nique la police", les numéros pour une pipe, les tags, les "Babou ma super friend", les " Vive

la France

", les " Faites l'amour, pas la guerre, acheter des capotes, et pas des bombres nucléaires", et bin tout ça , gravé dans l'écorce, c'est notre domaine!

On a payé et on s'est arraché.

J'ai traversé le voile de satin qui séparait l'envers du miroir. Là, des réseaux de ficelles arachnéennes se tissaient devant moi. Les mains en avant, j'écarta le rideau. Il y avait des nuages immenses, des sirènes dans la mer du ciel. Ton visage m'apparut. Comme un songe hanté. Moi, j'avais envie de te fuir et en même temps de me coller à tes seins. C'était horrible. J'aurais voulu pouvoir passer devant toi, et ne plus te dévorer que du regard. C'est décidé, je ne te ferais plus de mal. Je boirais l'alcool de ton souvenir, et je me soulerais pour oublier. J'accrocherais mes rêves dans un abattoir, et je te laisserais briller, là où les anges sont aveugles et noirs.

Au coin d'une rue, une nana nous a arrêté pour nous vendre du Subutex.
"Du quoi?" ais-je demandé.
"Du Subutex.
"Nan, mais c'est quoi le Subutex?"
"Un substitut à l'héro", avait-elle répondu, avec son faciès de momie.
Nous, à part chanté par Lou Reed, on s'en foutait de l'héroïne. On l'avait donc remercié et on avait continué notre périple dans les intestins de la ville. On allait bientôt arriver à la fin, et là, on se faisait de nouveau chier. Qu'est-ce qu'on foutait là? Où on allait? Qu'est-ce qu'on ferait de notre vie dans un futur proche? On n'en savait rien. On marchait. On se limitait à ça. C'était déjà pas mal. Paulo était complètement fracasse. Il nous parlait de sa grand-mère, de Youtube, et de sa sois-disant descendance vampire. Aller chercher le rapport.

Sur un trottoir, on a croisé des putes. Au début, je les avais pas calé. Je croyais qu'elles attendaient quelqu'un. Elles devaient pointé là depuis quelques heures apparemment. Des blacks, des ukrainiennes, des hongroises, des paumés. Des machines en tout genre. Des vies à vomir. L'une d'elle m'a chopé par le bras, comme pour m'inviter. Moi, j'ai continué de marcher en suivant les évangélistes, comme si de rien était. Je me suis senti mal. J'avais envie de me planquer. Cette vérité me hurlait silencieusement à la gueule et j'arrivais pas à me boucher les tympans. Je m'imaginais dans sa chambre. Elle, en train de se déshabiller, comme un automate. Moi, avançant. Et elle, le visage déjà mort, qui attendait, les jambes écartés. J'avais envie de tout dégoupiller dans le caniveau. Heureusement que Patou m'a rattrapé.

Pierrot a dit salut à un type complètement arrache, qui avançait, soutenu par deux potes, un à chaque épaule, comme des entraineurs autour de leurs champion de boxe K.O. Patou a appuyé à toutes les sonnettes d'un immeuble. On a alors piqué un sprint tout les quatre, en se tordant de rire. Chépas si vous avez déjà essayer, mais c'est super chaud.  Après une réflexion intense, je me suis dit, qu'à nous quatre, on formait un beau quatuor de bancales. Et pour ne pas tomber, on s’épaulait. Et donc on trouvait une espèce d'équilibre. C'est surement le truc qu'on appelle amitié.

Au bout de 20 minutes, les berges de

la Meuse

apparurent. Il faisait super sombre. Chacun tâtonnait à la recherche de l'embarcadère. On s'est alors arrêté, tout les quatre, face au grand lit noir de l'eau. De petits reflets blancs ondulaient à la surface. On entendait plus que quelques voitures au loin, et le murmure tout doux du fleuve. J'ai respiré profondément. J'avais envie de pisser. J'ai mis de la suite dans mes idées dans un buisson, et en revenant, j'ai vu Patou qui se déshabillait.
"Qu'est-ce que tu fous Jean-Marcel?"
"Je vais me baigner" lâcha-t-il entre deux chaussettes." Tu viens?"
"Et comment qu'je viens!"
Patou, Pierrot et moi, grelotant comme des fous, on se tenait sur le rebords. On s'est regardé en souriant et puis on a sauté. Un coup électrique supra violent m'a pourfendu l'échine, quand je suis passé sous l'eau. Waouwoua.....J'ai bien cru que j'allais m'éclater le cœur. On s'est mis tout les 3 à faire la planche, comme des naufragés.  La bouche en mode locomotive à vapeur, on se laissait porter, les yeux grands ouverts, dans un petit moment d'éternité. Le genre de moment que tu protèges au fond d'ton cerveau plus tard, pour pouvoir le sortir du fond de ta mémoires quand tu croupiras au fond d'un fauteuil à 70 balais. Pour pouvoir te rappeler du bon temps. Si t'as pas eu Alhzeimer entre temps. Bien sûr.

Pierrot jouait à la baleine blanche et Patou avait pris le large.
"Et vous savez pourquoi les suédois laissent dépasser le cul des morts?" a gueulé Pierrot.
"Tu vas me le dire, j'attends que ça."
"Bin, comme y a trop de vélo en Suèdes, faut bien trouver un moyen pour tous les garer? Et le cul d'un mort c'est parfait comme garage à vélo!"

L'eau était froide. C'était marrant. On a regardé Paulo, qui était tout seul sur l'embarcadère, à écrire dans son carnet. On s'est fait un clin d'œil avec Pierrot, et on est sorti pour prendre le spécimen et le balancer dans l'eau. Il eut une grimace de surprise sur le coup, mais il n'eut pas le temps d'avoir autre chose.
"Je ne sais pas na...." hurla-t-il, à demi-mot.
Il s'enfonça comme une brique et émergea de l'eau comme un bouchon de liège. Au début, c'était marrant de le voir se démener. Mais au moment où il a commencé à beugler, on s'est remis à l'eau et on a tenté de le ramener à terre. Pierrot est allé le prendre à l'épaule de droite, et moi à celle de gauche. Mais avec le froid et l'alcool, on s'était engourdis, et on arrivait seulement à le maintenir. Paulo lançait des regards perdus. Il respirait déjà plus facilement, mais il sombrait sous l'eau dès qu'on le lâchait. Heureusement, Patou est venu en renfort, et on poussé Paulo sur l'embarcadère. On lui a foutu la seule serviette qu'on avait sur son dos et on a l'a frotté de toute nos force. Le noyé cherchait de ses mains tremblantes son téléphone portable.
"Ne l'allumes pas. T'auras qu'à le faire sécher, et il remarchera" dis-je, "Tiens, ton carnet".
Il s'est levé pour aller vomir. Puis il est revenu, en titubant.
"Bande de con", qu'il a dit.

La lune s'était levé au-dessus de l'auto-route et du plan d'eau. Toute pimpante, elle illuminait l'embarcadère sur lequelle nous étions assis tout les quatre. Plus haut encore, des glaçons d'étoiles barbotaient dans un bain de vodka noire. Tranquilles et peinardes. On souffla un bon coup. Pierrot a dit alors " Foutre", moi j'ai roté, Paulo a dit " Putain de merde, fait chier quoi..." et Patou a rien dit.
C'était cool.

Après le gouffre blanc des nuages, je vis se dresser devant moi le vieux château, tout de lierre vêtu. Des épées de lumière traversaient les prairies célestes et venaient pourfendre les pierres du chemin de garde. Le chevalier m'attendait. Il enleva son heaume et me lança vers l'avenir. Sur la table, dans l'obscurité, il y avait les cendres de la sagesse, et quelques plumes de phénix. J'en pris une, je le remercia, et je tomba dans les nébuleuses.

Je suis dans l'immense forêt des séquoias. Pleine de silence et de chants. Je pose un pied sur le tapis des âges. Un ruisseau murmure au loin. Le bruissement des branches sous le vent. La magie dans l'air de la nuit. Les grincements des troncs. Le calme intérieur.

ANTOINE DELAHAYE

11 février 2010

COMME UNE ODEUR Séquoia : conifère de la famille

COMME UNE ODEUR

Séquoia : conifère de la famille des Cupressacées renvoyant à deux espèce différentes : le séquoia à feuilles d’if ou séquoia toujours vert (Sequoia sempervirens), pouvant atteindre jusqu’à cent mètres de hauteur pour huit mètres de largeur, et le séquoia géant (Sequoiadendron giganteum), qui n’atteint que quatre-vingt mètres de hauteur mais dont la largeur peut atteindre dix mètres. On n’en trouve plus qu’aux Etats-Unis, principalement sur la côte Ouest. On l’utilise pour fabriquer de nombreux objets en bois dont entre autres des tables ou encore des cercueils.

Note : ça brûle plutôt bien. Même très bien. Plus que je l’espérais.

Je n’avais pas grand espoir au départ. Du séquoia verni, c’était sûrement le genre de truc plus ignifugé que ça tu meurs. Eh bien, j’avais réussi l’exploit d’y mettre le feu.
Bien sûr, ça a dégénéré après, je n’avais pas pensé qu’il y aurait des objets inflammables à proximité et je me retrouvais désormais comme un con, cerné par les flammes avant même avoir eu le temps de finir ce que je voulais faire. Le bâtiment allait littéralement brûler sur place.
La salle était devenue désormais une véritable fournaise, la chaleur y était si vive que j’avais peine à y voir. Mes yeux et ma peau séchaient littéralement sur place malgré tout les efforts de mon corps pour tenter de bien hydrater.
Je n’entendais plus que le bruit des flammes. Apparemment, l’alarme incendie, c’était du toc… Même pas fichu de faire un bâtiment aux normes…
Ca y est, ma peau se mettait à carboniser, des cloques apparaissent littéralement sur mon corps mais je n’avais pas vraiment le temps d’y faire attention à vrai dire, mes nerfs ayant décidé d’alerter à toute allure mon cerveau que mon corps était en train de brûler sur place, cette information étant traduite par une douleur intense.
J’hurlais mais les flammes étaient désormais si vives que je ne m’étais moi-même pas entendu crier.
J’allais mourir là, entouré de tous ces cercueils. Plus tard, la police allait sûrement conclure qu’il ne s’agissait d’un incendie criminel ayant mal tourné, mon patron se ferait dédommager et on foutrait ce qui reste de moi dans une jolie urne que ma mère poserait au coin de la cheminée tout en pleurant sur le fils unique qu’elle a perdu. Ils n’auraient finalement pas tort… Enfin, il serait bien incapable de comprendre qu’au fond, ce n’est pas un incendie criminel, mais bel et bien un suicide…

J’ai toujours été lâche.
J’ai toujours été le genre de gars trop malingre et faible pour s’imposer et qui parasitait les forts en les aidant à taper les mecs qui s’opposaient à eux. J’ai toujours été le genre de gars qui se laissait engueuler par son patron sans réagir de peur de perdre son boulot et de se retrouver à la rue. Enfin bref, j’étais le mec lambda. Vivant à l’extérieur, déjà mort à l’intérieur.

Ce matin, j’avais été réveillé à six heures par mon téléphone qui hurlait à côté de mon oreille. Ma mère. Elle m’appelait à cette heure simplement pour me souhaiter un joyeux anniversaire, à croire qu’elle ne dormait jamais. Je ne me souviens plus ce que je lui ai répondu, sûrement un « Merci maman. » ou « Tu me fais vraiment chier, sale conne ! », peut-être même les deux.
Vu ma propension à l’insomnie, je savais que je n’aurais pas le temps de me rendormir avant qu’il ne soit temps d’aller bosser. La tête dans le gaz, je décidais donc d’aller petit-déjeuner. Croissants, tartines, lait, tout ce qu’il faut pour un grand et bel homme qui travaille dans un crematorium.

Etre croque-mort, c’est un peu jouer à la loterie tous les jours. Les trois-quarts du temps, tu te fais chier à t’occuper de cadavres de vieux tout propre et encore tout frais de l’hospice où t’as rien d’autre à foutre que les embaumer, histoire que si un jour on décide de vérifier qu’il est bien mort, il garde sa peau de bébé. Mais tu espères toujours tomber un jour sur le noyé resté dans l’eau pendant des semaines, le mec carbonisé jusqu’à la moelle après un incident de barbecue ou encore l’homme mort broyé dans une benne à ordure. Et puis il y a aussi les super jackpots, les bébés Harlequins et les elephant-men à qui tu dois donner une apparence décente malgré toute l’horreur que n’importe qui éprouve pour ces pauvres gens. Après avoir côtoyé la mort pendant des années, y a plus que les « monstres » qui font encore frissonner. Et lorsqu’on se dit qu’on a tout vu, on voit toujours pire.

Nouveau coup de téléphone, c’était encore ma mère. Elle me souhaitait un joyeux anniversaire, je lui dis qu’elle me l’avait déjà souhaité, que non, je n’avais pas dix-huit ans aujourd’hui mais trente-trois dans quelques mois et qu’elle devrait d’abord penser à se faire vite diagnostiquer la maladie d’Alzheimer si elle ne voulait pas que papa aille m’acheter dans pas longtemps un joli cercueil. Faut dire que la science faisait des progrès énormes dans ce genre de maladies… non ? Je raccrochais sans même lui laisser le temps de répliquer.
Je jetais un coup d’œil à la fenêtre, le soleil venait à peine de se lever. Crépuscule du matin. Je haussais les épaules face à un spectacle d’une si grande banalité et reprenais ma lecture d’un quelconque quotidien vieux de quelques mois tout en finissant ma tartine.

Deux heures plus tard, j’étais au boulot, prêt à passer une journée ennuyante à mourir (les sales jeux de mots font aussi partie de la profession, à force, on arrive même à s’en foutre de l’humour et à apprécier les programmes télés les plus cons, faut dire que

la Mort

fait relativiser beaucoup de choses).
Une heure plus tard, toujours aucun « client ».
Trente minutes plus tard, pause cigarette, un passant m’a demandé son chemin. La journée était toujours aussi radieuse, le temps toujours aussi sec.
Cinq minutes plus tard, je suis à nouveau devant le comptoir. Il semblerait qu’aujourd’hui était un jour de repos pour

la Mort.
Trent

e secondes plus tard, un vieillard appelait pour demander des informations sur le contrat obsèques. Je crois lui avoir répondu que j’en avais rien à faire de sa mort et que s’il espérait qu’on s’occupe de lui, il ferait mieux d’aller voir ailleurs, et surtout d’appeler plutôt une entreprise de pompes funèbres et par le crématorium directement.
Dix minutes plus tard, je me baladais.

Ma vie était un putain de métronome.

D’ailleurs, c’était l’heure de mon petit plaisir personnel. On a tous un petit pêché mignon, une chose qu’on fait sans aucune autre raison qu’un plaisir purement psychologique qui ne soit pas dû à de foutus composés chimiques extérieurs. Le genre de truc qui nous fait sécréter des hormones à plus savoir qu’en faire.
Je pris donc mon portefeuille et en sortit une vingtaine de photos. Ma collection personnelle. Ma petite galerie des horreurs. Des noyés, des carbonisés, des amputés, des déformés, des écorchés, des décharnés, des explosés, des désarticulés, des défigurés, des autopsiés. Tous pris ici, tous impeccablement habillés et tous avec deux points communs : ces mêmes foutus yeux vides et morts et ce même foutu cercueil en séquoia. J’en avais des frissons. Le moment où je regardais ces photos étaient le seul moment où j’avais l’impression de ressentir de la peur, le seul moment où je faisais face à

la Mort

dans tout ce qu’elle a de plus aléatoire et de plus macabre. Un vieux, c’est déjà un cadavre ambulant mais ça n’a pas ce regard vitreux que partagent tous ceux qui ont traversé le Seuil de

la Mort.

N’allez pas penser par-là que je suis nécrophile. Je serais bien incapable de souiller quelque chose d’aussi sacrée que

la Mort

avec mes fluides corporels.
Je ne suis guère fétichiste non plus. Si j’ai choisi à chaque fois le même cercueil, c’est parce qu’il est déjà réservé. La seule chose que j’ai jamais demandée à mon patron. « Réservez-moi ce cercueil ». Et je l’ai acheté. Je n’ai jamais compris pourquoi mon patron avait accepté de me le laisser.
Désormais, il trônait toujours au milieu des autres cercueils. Tous les jours, je le regardais, je touchais son intérieur en soie pourpre et, tous les jours, lorsque j’étais vraiment seul, je m’y allongeais et je tentais de le refermer mais je n’y arrivais jamais, c’était le seul le seul moment où je ressentais de la claustrophobie. Peu à peu, je m’étais mis à haïr ce cercueil. Moi qui pensais être parvenu à ignorer

la Mort

, ce foutu cercueil me ramenait constamment à ma propre faiblesse. Je crois que c’est à partir de ce moment que tous les soirs, j’y traînais des cadavres en pleine nuit pour les photographier. Je connais rien en psychologie mais j’imagine que c’est le genre de comportement d’un tordu, hein ?

Après quelques minutes de contemplation, je rangeais les photos dans mon portefeuille et continuais ma ballade. Les couloirs étaient vides, chacun de mes pas résonnaient dans l’air vicié des couloirs. Partout je ne sentais que l’odeur des produits désinfectants et autres désodorisants.
Une véritable atmosphère de mort.
Au bout d’un moment, je m’arrêtai. J’étais devant

la Porte

, celle-là même derrière laquelle se trouvait mon cercueil. Un frisson me parcourut l’échine, comme à chaque fois. Et comme à chaque fois, ma main hésita une seconde avant d’ouvrir

la Porte. Dans

un long grincement, elle s’ouvrit et pendant un instant, il me sembla que le Néant avait envahi la pièce.
A tâtons, je cherchai l’interrupteur. Les néons s’allumèrent l’un après l’autre. Des tas de cercueils étaient entassés là, prêts à l’emploi. Une vague odeur de vernis s’échappait de chacun d’eux. Parmi les cercueils soigneusement choisis par leurs propriétaires, il y en avait d’autre qui n’était là qu’au cas où. A vrai dire, étant tous destinés à brûler, je me demandais bien quel était l’intérêt de choisir précisément tel cercueil et pas un autre. Mais je n’étais peut-être pas le mieux placé pour critiquer ce genre de choses. Sûrement pas.

Il était là. A l’autre bout de la pièce, calé contre le mur, posé sur une table à roulettes métallique, il m’attendait.
Lentement, mes jambes m’amenèrent jusqu’à lui et lentement, mas bras soulevèrent le couvercle. Pendant un moment, mes yeux contemplèrent l’intérieur de l’objet tandis que mon cerveau semblait comme pris d’une violente crise de panique face à la question existentielle qu’était

la Mort. Je

détournai un instant les yeux, reprenant le contrôle de moi-même, en quelques sorte.
Lentement, je me hissais dans le cercueil et m’y allongeais. Je fixais désormais le plafond blanc pâle. Un néon commençait à rendre l’âme, clignotant et émettant ce son désagréable. A part ça, le silence. Je me sentais toujours aussi incapable de le refermer, ce cercueil. Ma lâcheté me donnait envie de vomir.
Pris de colère, je m’extrayais péniblement du cercueil et une fois les pieds de nouveau sur terre, je poussai le cercueil. Celui-ci tomba à terre dans un bruit sourd qui résonna dans toute la pièce. Puis je m’effondrai au sol, incapable de pleurer ni même de m’agiter dans tous les sens en essayant de tout casser. J’étais pathétique. La seule chose dont je fus capable à cet instant, ce fut de m’allumer une cigarette et de la fumer au milieu de tous ces cercueils.

Je ne me souviens plus très bien de ce qu’il s’est passé ensuite.

Le briquet. Le cercueil. La flamme. L’incendie. Tout est allé très vite. J’avais sûrement décidé de m’en débarrasser définitivement et de la façon la plus stupide possible. Même vernis, allumer un incendie au milieu d’objets en bois n’étaient pas la chose la plus intelligente à faite. Mais il aurait fallu aussi blâmer la femme de ménage qui avait stupidement laissé un produit nettoyant inflammable dans cette pièce.
C’était ridicule. C’était grotesque. C’était sûrement le destin. Et ce n’était finalement pas plus ridicule de se tordre le cou en trébuchant ou de se faire fracasser le crâne par des déchets d’avion évacués à plus de mille mètres d’altitude.
Le feu s’était propagé en un instant. Très vite tous les cercueils avaient pris feu et j’étais face à un véritable feu de joie. Cerné de toutes parts, la porte m’était devenue inaccessible. J’étais condamné à mourir comme un con dans l’incendie d’un crématorium. Ironie du sort.

Je ne savais plus quoi faire.

Je décidai donc de faire la chose la plus stupide possible. Quitte à mourir, je voulais au moins mourir dans ce foutu cercueil. Il était toujours là, au sol, il brûlait plutôt vite. Au moment où j’allais poser un premier pied dans le cercueil, mon téléphone sonna. Sans même regarder qui c’était, je pris l’appareil et le jeta de toutes mes forces dans la fournaise, sa sonnerie fut étouffé rapidement par le crépitement des flammes.
Je me remis donc à mon affaire.
Je posai un premier pied dans ce qui tenait désormais plus de l’enfer que d’un simple cercueil. La chaleur était insoutenable, mon pied était en train de brûler sur place mais je n’avais pas le temps de souffrir. Les flammes léchaient mon visage et je voulais au fond de moi ne pas mourir avant de m’être allongé dans ma dernière demeure.
Je sentais mes poumons brûler de l’intérieur. Mes doigts s’engourdissaient, du peu que voyais encore mes yeux desséchés, ils étaient couverts de cloques, je ne ressentais même plus la douleur. Etait-ce parce que j’étais tout simplement en train d’étouffer à cause du manque d’oxygène ? Etait-ce parce que la douleur était tellement forte que mon cerveau la refusait ? Ou était-ce simplement parce que mes nerfs avaient littéralement fondus sur place ? Un peu des trois sûrement.
Mon cerveau tentait encore avec peine de s’oxygéner. Ma tête avait le tournis. Alors que je parvenais avec peine à m’allonger dans le cercueil brûlant, je sentais peu à peu chacun de mes organes séchaient littéralement sur place là où ma peau et mes muscles avaient carbonisé.

J’étais en Enfer. Et j’attendais mon jugement.

Malheureusement, étant athée, ce genre de pensée ne m’avait pas traversé l’esprit. Je me dis juste que j’étais en train de mourir même si mon corps refusait cette idée et qu’il tentait encore vainement de survivre. Il ne devait pas comprendre pourquoi je lui faisais ça. Moi non plus d’ailleurs.
La dernière impression que j’eus, ce fut de me voir de l’extérieur, en train brûler sur place dans ce cercueil finalement trop petit pour moi… Et surtout moche, comment j’avais pu avoir eu l’envie de le prendre ?

Et puis ce fut le réveil.

Tout était blanc. Tout était silencieux. Ma vision était floue mais ne croyant pas au paradis, j’en ai donc déduit que je devais sûrement me trouver à l’hôpital. Impression confirmée par de vagues formes blanches qui tenait plus de l’être humain banal que de l’ange miséricordieux.
Je ne sentais plus du tout mon corps, je ne parvenais même pas à bouger la tête.
J’étais perdu, je ne comprenais pas comment quelqu’un avait pu arriver à temps pour me sauver et c’était pourtant le cas. J’avais même réussi à foirer ma Mort.
Les premiers jours furent pénibles, je ne voyais que des formes floues et je n’entendais plus rien, mes tympans ayant sûrement fondu. Mais à voir les quelques formes qui s’agitait autour de moi. Je comprenais que je devais être chez les grands brûlés avec tout ce que cela sous-entendais : nettoyage à grande eau pour retirer toute ma peau carbonisée, recherche de greffe de peau,… J’étais devenu un de ces cadavres qu’il tentait vainement de sauver. Ces personnes qui vivent encore alors qu’elles partagent le même regard vitreux que les morts.

Rester là immobile m’avait laissé tout le loisir de réfléchir sur des tas de choses : l’écologie, ma vie, les voitures, la politique, la musique… J’étais sur le Seuil de

la Mort

et je n’avais finalement pas grand-chose d’autre à faire qu’attendre.

C’est là qu’Il est arrivé.

Sourd et à moitié aveugle, j’aurais dû ne pas le remarquer. Et pourtant, il se faisait de plus en plus présent, de plus en plus insistant. Alors que je ne devrais rien entendre, je l’entendais respirer au creux de mon oreille. Alors que j’aurais dû ne voir que des formes blanches, je voyais plus nettement que les autres tâches floues une vague forme grise qui me tournait autour.
Chaque jour, je le remarquai de plus en plus. Chaque jour, j’avais l’impression d’entendre de plus en plus nettement ce qu’il voulait me dire. Peu à peu, toutes mes pensées se sont tournées vers cet Être, cette dernière chose qui semblait me rallier à la vie.

« Passons un Marché. » furent les premières paroles que j’entendis distinctement de sa part.

Il n’était pas toujours là. Il semblait parfois partir je-ne-sais-où. Mais je devinais sa présence sans même le voir lorsqu’il était à côté de moi. Il sentait

la Mort. Je

serais bien incapable de décrire cette odeur mais elle était loin de celle aseptisé du crématorium. Non, cette Chose portait la véritable odeur de

la Mort. Elle

n’était pas

la Mort

elle-même mais elle était la première chose qui semblait le plus s’en approcher.

Un jour, elle se découvrit enfin à moi.

Une forme distincte au milieu de cet univers informe que mes yeux avaient peine à supporter. Cette Chose n’était pas un être humain, ni même un être vivant. Son visage fut ce qui me frappe le plus. C’était un visage recouvert d’écailles grises où un unique trou semblait emmener tout droit vers le Néant. En y regardant d’un peu plus près, l’être n’était pas recouvert d’écailles, c’était plus proche d’une peau carbonisée et craquelée recouverte de cendres.

La Chose

était nue. Un trou courait le long de son torse mais, contrairement au visage, ce n’était pas le Néant qui s’offrait à mes yeux desséchés, mais des organes gris et suintants qui bougeaient, qui se tordaient, je voyais un liquide noire s’écouler de part et d’autre de ses organes. Jamais un spectacle ne me parût si atroce, alors que je pensais avoir toujours été préparé à tout.
Je voulais hurler mais aucun son ne sortit de ma gorge, pas même un simple raclement. Personne autour de moi ne prêtait attention ni à moi, ni à la créature.
Celle-ci s’approcha de moi, lentement, un semblant de main tendu. Un son poisseux et des traces noires apparaissent à chacun de ses pas, je n’arrivais même pas à comprendre comment j’étais capable de voir et d’entendre ces choses là.
La Chose était désormais à quelques centimètres de moi. Le trou béant de son visage semblait littéralement me fixer, prêt à m’avaler à tout moment.
J’entendis à nouveau ces mots : « Passons un Marché. » Je n’avais aucune idée de quoi elle me parlait, je ne savais même pas comment cette Chose pouvait même s’exprimer. Tout ce que je voulais c’est qu’elle s’en aille.

« Tu ne veux pas avoir une seconde chance ? »

Sa main, enfin ce qui ressemblait plus à un mélange d’os et de chairs fondus s’approcha de mon cou et le serra. Je commençais vaguement à comprendre que

la Chose

semblait vouloir m’aider… Mais avais-je vraiment envie de l’aide d’un tel être ?

J’ai toujours été lâche. Au fond de moi,

la Mort

m’a toujours fait peur.
J’aurais pu refuser, accepter mon sort, fermer pour de bon le cercueil dans lequel je me trouvais et me laisser mourir. Enfin.
Mais j’ai accepté. Je m’entendis dire distinctement du bout des lèvres, malgré le masque de respiration, malgré ma gorge carbonisée, je m’entendis répondre « Oui ».

Je ne parviendrai jamais à refermer le cercueil. Jamais.

Je me réveillai. Avais-je vécu un rêve ou avais-je vu le futur, ou même en étais-je revenu, je n’en sais rien. Mais j’étais à nouveau dans la fournaise, à nouveau dans mon cercueil. Mais je ne sentais plus la chaleur, je ne sentais plus les brûlures. Non, je ne sentais que l’étreinte froide de

la Mort

, et je ne m’étais pourtant jamais senti aussi vivant.
Je me levai hors de ce qui restait du cercueil en séquoia et posai les pieds sur ses cendres encore chaudes. Mes vêtements avaient brûlé, mais toute ma peau paraissait intact pour je ne sais quelle raison.
Sans me poser plus de questions, je me dirigeai vers la porte. Des cercueils entravaient ma progression mais sans même y réfléchir, je les écartai à mains nues. Je remarquai que si ma peau brûlait, elle semblait se reconstituait peu à peu, ne laissant que de vagues cicatrices blanchâtres à l’emplacement des brûlures. C’était parfaitement irrationnel mais je n’avais guère le temps d’y porte plus d’attention.
J’arrivai enfin à

la Porte. Je

posai la main dessus et m’apprêtai à l’ouvrir. Il me sembla alors malgré le vacarme de l’incendie entendre distinctement une voix. Je me retournai, je vis alors au milieu des flammes une vague forme que je reconnus immédiatement. C’était

la Chose. Elle

se tenait au dessus de ce qui restait du cercueil en séquoia. Elle sembla me fixer un instant.

« Nous avons passé un Marché. N’oublie pas. »

Un frisson me parcourut l’échine. Je ne savais plus quoi penser de tout ce qu’il se passait. Je me retournai vers

la Porte. Ma

main hésita un instant avant de l’ouvrir. Au moment même où j’allais traverser la porte, je sentis à nouveau cette odeur de Mort de l’hôpital.

« Nous sommes liés désormais. »

PAUL CRUBELLIER

11 février 2010

Le miracle d'une vie "Général!"Pff...

Le miracle d'une vie

    "Général!"
Pff... Que me voulait-il encore? J'étais en train de dormir.
"Général! Réveillez-vous, les journalistes sont ici. Ils veulent nous voir pour faire un article sur nous."
Cette fois, c'était la goutte d'eau pour faire déborder le vase; Grant m'avait vraiment tiré de mon sommeil.
"Général Grant, vous m'embêtez! Vous ne voyez pas que j'essaye de prendre un peu de repos?" lui répliquai-je.
"Vous devriez vous habituer maintenant, reprit-il. Vous devriez surtout être au courant que toutes les formes de célébrité nous amènent du monde. C'est comme ça, et pas autrement: ce sont les lois de la nature."
"Est-ce que c'est Lincoln qui vous a mis en tête de telles absurdités? Parce que si c'est le cas, il n'a qu'à se faire la vedette tout seul."
Voilà ce que je lui répondis. Ce jour-là, je voulais me rebeller, car ma situation devenait invivable. J'étais vieux, j'étais immobile, j'étais condamné à avoir la visite de personnes que je ne connaissais pas. Et tout cela à cause de quoi? Parce que la renommée avait fait de moi un être prestigieux, connu de par le monde entier. Je dominais mes acolythes, mais sans guère en tirer de satisfaction. Un être inintéressant: voilà qui j'étais.
"Les voilà! Regardez un peu, Général Sherman, l'effet que nous leur faisons!" s'exclama Grant, revenu à la charge.
"Ecoutez, Grant: ces visages étonnés sont toujours les mêmes, et jamais ils ne seront originaux. Alors cessez de penser à des choses aussi futiles!"
Ce jour-là qui plus est, j'avais l'impression que le monde entier s'était organisé pour venir me déranger. Autour de moi, je voyais affleurer des journalistes, des grandes personnalités, des hommes, des femmes, des enfants par dizaines. J'avais le monde à mes pieds.

    L'après-midi fut très long. Je passai mon temps à observer ce qui se passait autour de moi. Certaines choses furent amusantes, d'autres moins.  Grant semblait vénérer nos visiteurs; pas moi. Lincoln, quant à lui, s'était rendormi. Grant s'accapara d'une famille d'écureuils qui se réjouissait à l'idée de lui grimper dessus.
"Halte-là, vous me chatouillez, espèce de casses-noisettes!" s'exclama-t-il lorsque les rongeurs eurent terminé une escalade sur le Général Grant, qui leur avait semblé vertigineuse.
A quelques mètres de nous, Lincoln était sorti de sa somnolence. Un groupe de scientifiques était en train de mesurer son tour de taille.
"Quelle humilation! C'est indécent de procéder à de telles mesures en public!" se mit-il à râler.
Moi, je détestais ces gens. Par leur faute, j'avais perdu mes enfants. Ils les avaient emmenés en Europe, me les enlevant jadis sans penser à la douleur qu'ils avaient pu me causer. Ils restèrent toute leur vie là-bas, je ne les avais jamais revus. Allaient-ils, de même, emporter Lincoln, et l'abandonner auprès de mes enfants?
Je commençai à sentir des picotements, et très vite alors je compris que j'étais placé sur une fourmilière.
"Général Sherman! Regardez à vos pieds, une colonie de fourmis!" s'exclama Grant, qui avait enfin réussi à faire partir la famille d'écureuils, non sans difficultés.
"Ah ben dites donc, je ne sais pas comment vous faites pour supporter ces insectes! Pour ma part, il y a bien longtemps que j'ai réussi à leur faire comprendre que je ne voulais pas d'eux..." reprit-il.
Je voulais qu'il se taise, les fourmis étaient déjà un assez gros souci à gérer. Mais pour mon grand malheur ce jour-là, je réalisai très vite qu'il n'y avait pas plus bavard que lui aux alentours.
"Sherman, vous savez quoi? J'ai entendu des scientifiques dire que j'étais très robuste et plein de vigueur... Je crois même qu'ils m'ont trouvé magnifique! Tout ça, c'est sans doute grâce à vous Général, vous m'avez toujours poussé à m'élever plus haut, voilà enfin l'admiration qui m'est dûe..."
Voilà qu'il se taillait un ego surdimensionné en plus de cela! Il était devenu maintenant aussi insupportable que les fourmis qui me grimpaient dessus. Qui devais-je réprimer en premier?
"Grant, cessez de parler, ou je fais glisser ma colonie de fourmis jusqu'à vous!"
Cette dernière parole le scia.
"Comment, Général Sherman? Vous pourriez faire ça à votre ami?"
"Grant, pour la dernière fois, je ne suis pas votre ami mais votre supérieur et vous n'avez pas à me répondre ainsi. Je vous en supplie, taisez-vous, c'est pour le bien de la communauté."
Alors, dans un soupir, Grant comprit que ses paroles m'étaient devenues insupportables, et il se pencha vers Lincoln pour continuer sa discussion.
"Rassurez-moi, Lincoln, vous ne supportez pas non plus les colonies de fourmis, n'est-ce pas?" lui demanda-t-il.
Mais Lincoln ne lui répondit pas, car il essayait de se contenir pour ne pas s'énerver contre les scientifiques qui prenaient maintenant ses mesures depuis un bon quart d'heure. Il n'en pouvait plus.

[fin]
    En fin d'après-midi, la chaleur était devenue étouffante. Je ne pouvais pas profiter d'une parcelle d'ombrage, j'étais désespérément abandonné de tout secours extérieur. Et puis il y avait ce soleil, qui s'amusait à se placer à chaque endroit où il pouvait me trouver. Je haïssais le soleil, tout comme je haïssais ma vie devenue insipide; de même, je haïssais l'endroit où je me trouvais et où je terminais ma vie. Je voulais mourir, mais personne ne voulait m'aider. Et puis, j'entrevis la possibilité d'un miracle. Devais-je vraiment me plaindre de ce qui était en train de m'arriver? Je voulais simplement voir le sublime, et puis, après seulement, je pouvais mourir. Finalement, alors que je me morfondais à faire le bilan de ma vie, je compris deux choses. La première était que j'avais voulu obtenir la gloire, juste pour être remarqué. J'avais travaillé mon être, j'avais persévéré pour pouvoir m'élever toujours plus haut, et remonter toujours plus dans l'estime des autres, de ceux qui m'entouraient. Oui hélas, je progressai toujours plus, et je m'imaginais ne pouvoir toucher que du bois. Mes rêves me donnaient des illusions, et j'y croyais encore. Finalement, cette gloire et cette reconnaissance ne m'apportèrent pas ce que j'attendais. Car je me rendais maintenant compte que renvoyer simplement une image extraordinaire au monde de moi-même, ça n'était pas la vraie vie. La seconde chose que je compris était que mon orgueil et ma vanité m'avaient pourri de l'intérieur. J'étais devenu un être froid et cruel, qui, sans doute un peu tard, commençait à s'interroger sur le sens de sa vie. Et puis l'effet inverse de ma popularité se déclara rapidement: je m'étais renfermé sur moi-même, créant autour de mon être une protection à ma solitude semblable à l'écorce d'un Sempervirens.

    Je sentais sur mon flanc le vent chaud et l'air sec s'introduire à travers mes ligaments, seuls témoins de mon désespoir. Comme ma face n'était pas expressive, personne ne pouvait deviner ce qu'il m'arrivait. A mes pieds, mes admirateurs commençaient à se disperser, comme l'après-midi touchait à sa fin. Oui, je voulais qu'ils partent.
Et puis le vent, la chaleur, le soleil, la sécheresse ont commencé à m'assoiffer. Moi de même, je sentais que je m'asséchais, peu à peu. Je ne ressemblais plus à rien. Et puis soudain, non loin de moi, je perçus quelque chose d'étrange. La chaleur qui régnait quelques instants auparavant s'était transformée en un souffle brûlant qui me parvenait à l'endroit où je me trouvais.
"Général Sherman, l'atmosphère est devenue anormale..." Grant commençait à s'inquiéter.
"Grant, voyez si Lincoln est au courant de ce qui est en train de se produire." lui répondis-je, avec beaucoup de calme, chose qui m'étonna moi-même.
"Le danger semble proche! Lincoln me fait savoir qu'il y a un début d'incendie à quelques mètres de l'endroit où nous sommes! Qu'est-ce qu'on va faire?" Grant passa subitement de l'inquiétude à la panique.
J'évaluai alors la situation: la chaleur, la sécheresse et le vent s'étaient mêlés pour engendrer les premières flammes que nous voyions arriver rapidement devant nous. Avaient-ils compris ma mélancolie? En quelques secondes, le feu nous gagna. Je considérai les flammes calmement, elles qui étaient à si peu de distance de moi. Puis, dans un immense soulagement, je me laissai parcourir par ces flammes. Enfin...

Epilogue

    Lorsque, quelques heures plus tard, les pompiers eurent fini d'éteindre le gigantesque incendie qui s'était déclaré dans le parc, ils dressèrent le bilan des dégâts causés par les flammes. Lincoln avait été seulement légèrement brûlé, et, par chance, il avait gardé sa vigueur. Grant, parce qu'il était encore dans un âge florissant, avait sû se montrer robuste et résister à la force du vent qui avait traîné les flammes jusqu'à lui.
Sherman, quant à lui, avait péri dans les flammes. Le doyen s'était éteint, sans bruit, avec un grand courage. A cet instant-là, il avait eu la profondeur d'âme à côté de laquelle il était passé toute sa vie.

L'incendie avait accompli la volonté du Séquoia.

BENEDICTE TRAMONT

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11 février 2010

Prés en bulle Cette histoire ne raconte pas celle

Prés en bulle

   

    Cette histoire ne raconte pas celle que vous croyez. Coya c'est qu'un personnage parmi tant d'autres. Je tenais à la remercier de m'être apparue.Apparamment il faut que j'écrive quelque chose là dessus. Sur qui? Sequoia ou Coya. Quelle idée d'écrire une histoire sur un arbre. Un simple arbre qui  est peut être, aujourd'hui dans notre chambre, en cendre ou encore à nos pieds. Ce soir je suis fatigué, le créateur de ce concours croit vraiment que je vais passer 24h à me dédier à l'écriture d'une nouvelle. Peu importe, si ça peut m'aider, tant mieux. Je mets donc de la musique, allume une bougies et ouvre l'ordinateur que je trouve sous la main. Mon esprit va bâtir petit à petit un récit qui n'attends pas d'être noté, ni d'être félicité. Juste un récit qui laisse entendre une joie dans l'art d'écrire. Ecrire, c'est très important pour l'être humain. Le fait d'inventer des histoires, des démonstrations, nous rend plus fort. On se rend pas compte mais lorsqu'on fini un écrit une lettre, un poème... on sent en nous un certain accomplissement « intellectuel ». Je vous promets pas une histoire haute en rebondissements digne d'un Harlan Coben, mais ce que je vous promet, c'est de faire de mon mieux afin que ce film vous soit agréable.

Premier et Dernier Chapitre

    Lucky Strike. Ipod au oreilles. Sac à main. Bonnet marin. Comment vous décrire ce qui se dressait devant moi. Elle était ravissante. Ses cheveux blonds, sa robe rose et ses moufles violettes laissaient entendre que cette fille là n'était vraiment pas comme les autres. Elle s'appellait Coya. Enfin je crois. Mais mon histoire ne commence pas par là.

    Il y a voilà un mois que je suis à la fac. Je fais des études dans l'histoire de l'art. Croyez moi chaque jour j'ingurgite du point de fuite, de la perspective, de la couleurs, des ombres. Mais avant tout je me saoûle de Rothko, Buren, Koons... Toutes ces crapules que je n'aime pas. Malheureusement j'en entends parlé tous les jours dans les cours d'art moderne. Mes journées se résume à étudier ces fous. Il y en a que j'aime, mais d'autre que je hais, mais haïr à tel point que je pourrais faire mes besoins sur leurs planches. A part ça la vie à Strasbourg c'est vraiment extraordinaire. Je profite des fraîches matinées pour faire quelque jogging le long de l'Ill. Apparamment pour plaire au filles, il faut avoir une carure athlétique. Moi je veux bien... mais je n'y crois pas trop. Alors je trouve bon de faire des joggings, même si ce n'est pas dans l'objectif de perdre de la graisse. Mais non! Dejà parce que je ne suis pas obèse, mais parce que je ne suis pas en quête d'une histoire d'amour. Les histoires d'amour ça marche que dans les films. Non pour moi tout les matins, courir me permet de respirer l'air frais et puis de me dégourdir les jambes. Un quotidien que j'apprécie, parce que là où ma famille habite on ne peut pas profiter de cette vie.

    On m'a toujours dit, la campagne c'est mieux que la ville. Mes parents habitent dans les montagnes vosgienne. Chaque week end je rentre chez mes vieux. J'en suis nostalgique à chaque fois que j'en parle. Les serments de maman et les théories débiles de mon père... que ça me manque! Et vous pouvez être sûr que tous les week end c'est comme ça. Mon père aime Margaret Tchatcher, les films de Michael Bay, le journal de David Pujadas, l'andouille du pays d'Auge, les repas du Dimanche...Mon père c'est ce fameux hippie qui n'a toujours pas compris que Woodstock était fini. Il traîne dans les bois, fume le marijuana, colle des autocollant « Nucléaire non merci » sur le cul des voitures. Sa voiture c'est un mythe. Il faut vous imaginer un combi Volkswagen, Joan Baez cohabitant dans ce van, un cracha noire à chaque accélération soudaine. Maman elle , c'est autre chose. Elle aime regarder le catch le samedi soir, fumer après le café, aller faire les soldes, couper du bois. Ses théories sur l'enfant idéal sont nombreuses. Elle croie que ses enfants vont devenir des Marie Curie. Elle s'arrange pour qu'à chaque fois ce soit les autres qui fassent ce qu'elle n'a pas envie de faire. Enfin c'est ma mère et je ne peux rien y faire. Quand je rentre, j'entends toujours le même refrain. Je suis parfois très dépayser et j'ai du mal à croire que j'ai passé mon enfance dans ce village. Les week end passent et se ressemblent. Papa vient me chercher à la gare. Nous remontons sur les hauteurs. Nous discutons dans la voiture et arrivons à la maison. Et le week end passe... Je reviens dans ma chambre universitaire avec pleins de cadeaux que maman m'a gentillement préparée. Je pourrais presque nourrir un régiment.

    La semaine reprend son train. Je prends le tram de

la Robertsau

pour arriver au centre universitaire. Le temps est maussade. Les feuilles mortes quittent leurs maîtres et se laissent emportées par le vent ( depuis le temps qu'elles attendent ça !). Les nuages sont lourds et noires. La rivière est comme peinte d'un gris métallique. Il fait froid. La cathédrale est toujours là comme maître des lieux. Elle parait sous son manteau d'hiver. Le grès est comme meurtri, le soleil ne ravivant plus sont coeur saignant. Le tram me dépose au campus. C'est une sensation bizarre ce batîment. Je ne reconnais jamais les même personnes. J'ai l'impression qu'a chaque fois, les étudiants ont le feu au cul. Ils marchent d'un rapidité! Ils s'engouffrent dans les longs couloirs, se faufilant entre les autres se percutant (car un accident est si vite arrivé) et s'excusent rapidement puis poursuivent leurs chemin. C'est vrai que les études c'est stréssant. La société dans laquelle nous sommes nous aide pas vraiment . Aujourd'hui il faut que tout aille vite. Si un salarié est trop lent, l'entreprise le limoge et embauche quelqu'un d'autre. Si malencontreusement l'Adsl ne marche plus et qu'on passe au 56k, je vous dis pas notre réaction ! Si nous attendons trente minutes dans une grande surface, nous faisons un scandale auprès de la caissière et nous la traitons d'incompétente. La vie moderne c'est ça: la rapidité, l'argent, le sexe, internet et le travail.

    Les cours sont finis. Je ne perds pas mon temps à flanner dans Strasbourg. Je garde mes journées de libre pour ce plaisir là. J'arrive à la cité universitaire Robertsau.Ca me surprend toujours, quand je rentre dans la cité U, il n'y a jamais personne. Les couloirs sont vides, j'entends simplement de la musique et le bruit de mes pas. Je m'imagine souvent toutes les cultures mélangées dans cette maison. Imaginer une vue de dessus, un shéma des chambres qui se suivent. Et si nous savions les éléments de chaque lieux, nous trouverions une diversité culturelle extraordinaire. Ma chambre est des plus banales. Un lit, une armoire, une salle de bain, un bureau, une plaque éléctrique. J'ai aussi accroché un poster de l'exposition Van Gogh. J'ai ramené quelques bouquins de ma cambrousse: Bukowski, Auster, Barjavel, Orwell, Céline, Barbery. J'ai pris dans mes bagages mes DVD les plus cher: Blade Runner, Shining, Apocalypse Now, The Dark Knight... Je suis assez fière de ma chambre, elle me correspond bien. Mais croyez moi, je pourrais pas y vivre éternellement.

    Au moment des journées de libre, je vois mes amis. Il y a Fabrice, le grand cinéphile. Il me parle cinéma, photos, art, un vrai critique. On se connait depuis un bon moment. Le voir me fait toujours plaisir. Il fait un école de journalisme.Il aime le Cassavetes et Bergman. Il pèse 65kg. Il a une petite copine Audrey (si ça vous intéresse). Il y a aussi Olivier. Le type qui fait que des conneries, celui qui nous revient à chaque fois pété et bourré. Il aime Bastian Schweinsteiger et

la Mannschaft. Il

pèse 70kg. Mais je connais des filles aussi! Il y a Anna. Cette fille est géniale. Elle est toujours là quand il faut pas, mais c'est pour ça que je l'aime. Elle aime Koh Lanta, Twilight donc forcément Robert Pattinson. Mais ce qu'elle aime le plus au monde c'est les marrons glacés. Elle pèse 57kg.

    J'ai l'impression que vous vous faites chier. Je vous avais prevenus!

    Souvent il m'arrive de rêver. Je ne parle pas des rêves qu'on peut avoir lorsqu'on est gamin. Non! Les rêves de jeunes adultes. Les rêves érotiques, cauchemars… Je voulais vous confier un de mes rêves…

    Je me trouve dans un forêt de chênes. Le tapis de feuilles devant moi est très moelleux. Des roches de granits sont posées ça et là à quelque mètres. Je m'avance, poussant les feuilles qui recouvrent mes pieds. Une légère brume s'étale entre les arbres. Tout d'un coup j'entends un oiseau partir de sa branche et s'envolé au dessus des arbres. Mon regard s'égard sur le ciel. Ce ciel est gris rose. Je me remet en marche, mais dès ce moment là, une jeune fille se tient droite devant moi. Elle fume une Lucky Strike, écoute de la musique. Elle me regardait comme si ces paupières inférieurs était tirées vers le bas. Elle ne bougeait pas. Elle était comme enraciné dans la terre et le vent ne faisait que dégager ces cheveux blonds. Le contexte me paraissait vraiment étrange. M’avançant petit à petit vers la créature, je me rendais compte qu’elle était vraiment belle. L’oiseau vint se poser sur son épaule. Je ne comprenais pas, mais cette bestiole venait de lui crier un son à l’oreille. Un son a arraché les tympans, comme si la corneille cherchait à réveiller sa maîtresse. Il me semblait qu’elle voulait la réveiller pour qu’elle se rende compte qu’un homme était en face d’elle, pour que ces membres fonctionnent, comme si c’était l’oiseau l’élément déclencheur. Il a repris son envol et la jeune fille c’est mise à gesticuler. Elle a couru droit sur moi et m’a percutée. C’est à ce moment là que je me suis réveillé. Je demeurais seul dans ma chambre, sur le sol (j’étais surement tombé du lit). La sueur coulait sur mon front. J’avais l’impression que ce rêve était réalité. J’alla me désaltérer pour essayer de penser à autre chose.

    Ce rêve m’avait vraiment bouleversé, à la fois par l’aspect réaliste qui ressortait, mais aussi par le phénomène que ce rêve avait engendré dans mon esprit. J’étais persuadé que cette fille existait. J’avais le pressentiment qu’à des milliers de kilomètres ou à quelque mètre cette fille avait fait le même rêve. C’était la même disposition en y pensant bien. Dans ce rêve je n’ai pas le souvenir d’avoir bouger, d’avoir fait un pas. C’était la rencontre avec cette fille qui me paraissait étrange. J’avais enfin rencontré la fille. Elle m’avait enfin rencontré. Aujourd’hui les gens se rencontrent sur internet, dans des bars, des soirées, au McDonalds…Moi non ! La rencontre c’était fait réciproquement dans nos rêves personnels. Mais comment se revoir ? Comment l’apercevoir ? Vit-elle vraiment dans ce monde ? Je n’espérais pas grand-chose de ces questions. Elles donnaient en moi un espoir minime de toucher cette beauté.

    Mon quotidien devint las. Je m’épanouissais plus dans l’art, l’art ne me comprenait plus. Les footings le long de l’Ill se firent de plus en plus rares. Je commençais à écrire, remplaçant le crayon aquarelle par un stylo. J’écrivais mes rêves dans l’espoir de voir des signes de vie de la demoiselle. Je l’appelai Lucky, pas par son goût pour cette marque de cigarette, mais pour la baptiser afin qu’elle grandisse avec moi. Je commençais moi-même à fumer, a vider des bouteilles de Jack Daniels, a manger des cacahuètes grillées, toutes ces choses qui vous permette d’oublier. Au fil des jours, je remplissais mon Moleskine de rêves bizarres et incompréhensible. Je me disais peut être que quand je la reverrai et pourrais lui parler de mes écrits. Surement que ça lui plairait. Moi je n’aimais pas relire ce carnet, il me faisait peur. Mes amis avaient lus quelques morceaux du bouquin. Ils s’interrogeaient à chaque fois du comment je pouvais imaginer de telles choses. Je m’étais intéressé pour la psychanalyse et leur répondit que tout ce dont ont rêvait laissait paraître une part de vérité. Fabrice n’était pas d’accord. Il pensait que ces illuminés n’étaient que des marchands de tapis, qui donnait à leur patient un sentiment de malaise et de peur. Olivier lui s’en foutait royalement. Il n’était pas intéressé par ça. Anna si on ne lui parlait pas de Twilight ou des audiences de TF1, elle faisait la sourde d’oreille. Mes amis ne m’aidaient pas à comprendre pourquoi je rêvais de telle ou telle choses. Nos relations finirent pas s’estomper et je fus vite confrontés à moi-même.

    Quatre ans plus tard.

    Maman est morte hier. Le cancer l’avait pulvérisée. Depuis quelques mois, elle passait son temps à l’hôpital. Les visites de papa se comptaient par les doigts de la main. Le boulot l’empêchait de venir la voir. Je me mets dans l’idée qu’on l’a vraiment abandonné. Moi et Papa n’étions jamais là au moment où elle en avait besoin. Comme nous étions sollicités moi dans ma troisième année de fac de psycho et Papa dans son bureau, nous l’avions abandonné et laissé périr. Ce sentiment commença à me ronger. Je ne savourais rien. La simple d’idée d’avoir laissé mourir maman me rongea. Papa n’était pas très bien. Il était allé voir maman à l’hôpital la veille de sa mort. Ils se confièrent tant de choses que Papa ressortit de la chambre en pleurant. Quand ce fut mon tour, je m’excusai d’abord de mon absentéisme total. Ce moment fut l’un des instants les plus beaux de ma vie. Elle me fit comprendre que même si je n’étais pas venu la voir, je demeurais en elle quoi qu’il arrive. Elle se faisait des soucis pour moi. Je lui parus très changé. Notre conversation fut interrompit par les médecins qui vinrent pour une injection. J’embrassai maman, lui avoua que je l’aimais et m’en alla. Papa était déjà parti au boulot ! Je ne pouvais en croire une seconde, lui qui avait été si aimable durant toute leur vie, et là, il l’avait vraiment abandonné.

    Les moments qui suivirent l’enterrement furent des plus horribles. Tous ces faux culs qui venaient regretté la mort de ma mère, me donnait une envie de vomir. Je souhaitai bon voyage à maman et m’en alla aussitôt sur Strasbourg.

    Dans ma R5, je mis de la musique, pleura quelques instants, embrassa mon père par la fenêtre, lui souhaita bonne chance et parti. La chanson « Wind of Change » de Scorpions me mit du baume au cœur. Je fus obligé de m’arrêter pour pleurer. La nuit était tombée. La forêt de chênes donnait une pénombre totale. Mes phares projetés en avant n’éclairaient guère. Ma tête dans mes mains, je me tapais la tête contre le volant. Je m’allumai une cigarette dans l’espoir que mes idées noires disparaissent. Soudain, j’entendis quelqu’un toqué à la fenêtre du coté passager. Je tendis le bras vers le clapet qui ouvrait la porte. La personne ouvrit. C’était surement une autostoppeuse. Je lui demandai où elle allait. Elle me répondit qu’elle allait où j’allais. Je fus étonné ! Ca me paraissait vraiment étrange. Mais pouvais-je laissé cette demoiselle là, dans la nuit, avec tout les violeurs qui traînent dans ma campagne… Je l’invitai à rentrer dans la voiture. Elle s’assit, souffla dans ses mains froides, ferma la porte et me remercia d’avance. Je démarrai ma voiture. Une conversation s’installa peu à peu, faut dire que la route de mes parents à Strasbourg est très longue. Un moment, elle me demanda mon prénom, apparemment, elle m’avait déjà vu quelque part. Etrange ? Cette fille ne me disait rien. Réciproquement, je lui demandais gentiment son prénom.

   

    « Je m’appelle Coya »

FIN

JEAN DELAHAYE

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